L’intelligence artificielle est arrivée dans le milieu de l’art provoquant dans son sillage un vent de controverse.  

L’histoire débute en octobre 2018 avec la vente aux enchères d’un tableau Le Portrait d’Edmond de Belamy réalisé par une intelligence artificielle. Elle a été adjugée plus de 400 000 dollars, soit 45 fois son estimation (entre 7 000 et 10 000 dollars) !

La technologie des Réseaux Antagonistes Génératifs : GAN

L’œuvre a été conçue par un algorithme qui produit des images à partir d’un corpus de 15 000 tableaux existants, dont l’IA « apprend » les caractéristiques. La technologie utilisée est appelée GAN pour Generative Adversarial Networks (réseaux antagonistes génératifs). Ces réseaux utilisent un échantillon, là des images d’œuvres, pour en déduire des tendances (un buste, une vue de trois quart…). L’intelligence artificielle s’appuie dessus pour en créer de nouvelles.

Les GAN ont recours à deux modes de traitement de l’information développés pour imiter le cerveau humain :

• un « générateur » qui crée les images
• un « discriminateur » qui les compare à la base de données d’apprentissage pour s’assurer qu’elles correspondent aux schémas que la machine a repérés à partir des données en question.

La polémique qui s’en est suivie est double. Le collectif français Obvious, qui est à l’origine du projet, s’est vu reproché qu’il n’avait créé ni l’algorithme ni les données d’apprentissage. Les GAN sont en effet des algorithmes mis au point en 2014 par le chercheur en intelligence artificielle, Ian Goodfellow.

Autre critique plus philosophique : l’intelligence artificielle qui est capable de copier, d’inventer et de créer est-elle un artiste ? Est-ce que le résultat qui découle des algorithmes est une œuvre d’art ?  Autrement dit, la création est-elle forcément le propre de l’homme ?

Créativité et Intelligence Art-ificielle

Pierre Fautrel, co-fondateur d’Obvious, se défend en faisant un parallèle avec la photographie. « En 1850, on reprochait aux photographes que leur travail était flou, que c’était réservé à des ingénieurs qualifiés, que ce n’était pas de l’art et que cela allait détruire les artistes. » Ce sont exactement les mêmes critiques qui sont aujourd’hui objectées au collectif Obvious. Elles sont en fait « liées à l’arrivée d’un nouvel outil dans un processus artistique », tout comme l’a été l’arrivée de l’appareil photo. « On se rend compte, 250 ans après, poursuit-il, que la photographie est simplement une technologie. Les artistes, ce sont les gens qui ont une vision, qui arrivent à faire quelque chose de créatif avec ces outils-là. »

Pierre Fautrel va plus loin en expliquant que le but n’est pas de provoquer mais plutôt de vulgariser l’Intelligence Artificielle : « L’Intelligence Artificielle est un vrai sujet de société qu’on souhaite démythifier et l’art est un bon vecteur pour le faire ».